29/05/2024

Les détails du réseau florissant d’un propagandiste du Kremlin, des échanges avec lui et un extrait du livre à venir du co-PDG de NewsGuard, révèlent l’influence mondiale d’un ancien shérif adjoint de Floride exilé à Moscou

Parmi les activités du fugitif américain John Mark Dougan, à qui le Kremlin a accordé l’asile : des menaces contre le domicile new-yorkais de Steven Brill, un faux “documentaire” sur des laboratoires d’armes biologiques en Ukraine ayant servi de prétexte à l’invasion russe, et un réseau de 167 sites web lancés aux États-Unis et en Europe qui se font passer pour des sites d’information locaux.

(29 mai 2024 — New York) – Un nouveau rapport spécial de NewsGuard lève le voile sur un réseau de désinformation sophistiqué et tentaculaire orchestré par John Mark Dougan, un ancien shérif adjoint de Floride qui réside aujourd’hui à Moscou sous la protection du Kremlin. Ce réseau, qui s’étend sur 167 sites web repérés par NewsGuard, qui se font passer pour des médias locaux, diffuse régulièrement de faux récits servant les intérêts russes à l’approche des élections américaines.   

John Dougan, qui s’est réfugié à Moscou après avoir fait l’objet d’une enquête pour piratage informatique et extorsion, a joué un rôle central dans plusieurs grandes campagnes de désinformation, notamment la production d’un documentaire prétendant prouver l’existence de laboratoires d’armes biologiques gérés par les États-Unis en Ukraine. Il est également à l’origine de menaces directes à l’encontre de Steven Brill, co-PDG de NewsGuard, ainsi que sa famille, et s’est fait passer pour un agent du FBI.

Le rapport de NewsGuard, qui peut être consulté ici (en anglais), comprend des mois de conversations entre McKenzie Sadeghi, analyste pour NewsGuard, et John Dougan, ainsi qu’un extrait du prochain livre de Steven Brill, “La mort de la vérité” (“The Death of Truth”). Ce rapport explique en détail comment NewsGuard a assemblé les pièces du puzzle de l’opération de désinformation complexe et multi-médias du Kremlin à l’échelle mondiale.

Principales conclusions : 

  • NewsGuard a identifié 167 sites web apparemment liés au réseau de John Dougan, se faisant passer pour des sources d’information locales et diffusant de la désinformation pro-Kremlin, y compris des articles visant à exacerber la polarisation politique aux États-Unis et à saper la confiance dans les élections à venir. Ces sites qui se présentent comme des sites d’information locaux indépendants, avec des noms tels que DCWeekly et Chicago Chronicle, ont publié plus de 50.000 articles au cours de l’année écoulée, avec des récits régulièrement amplifiés par les médias d’État russes, les fonctionnaires du Kremlin et des bots sur les réseaux sociaux.
  • John Dougan a produit 15 documentaires justifiant la guerre de la Russie contre l’Ukraine. L’une des œuvres les plus notables de John Dougan est un faux documentaire affirmant que des laboratoires d’armes biologiques gérés par les États-Unis se trouvent en Ukraine. Cette vidéo a été citée par les autorités russes comme prétexte à l’invasion de l’Ukraine en 2022.
  • Les opérations de John Dougan incluent aussi une vidéo YouTube montrant des images aériennes de la maison de Steven Brill à New York, un appel téléphonique à Steven Brill à son domicile, au cours duquel John Dougan s’est fait passer pour un agent du FBI (ce qui est un crime fédéral), et un deuxième appel téléphonique menaçant Steven Brill et sa famille. 
  • NewsGuard a identifié 19 récits de désinformation apparemment émis par le réseau de John Dougan entre septembre 2023 et mai 2024. Ces faux récits ont généré au total plus de 37 millions de vues sur les réseaux sociaux en 16 langues, et les fausses affirmations ont été amplifiées par des législateurs américains, dont la représentante républicaine Marjorie Taylor Greene et le sénateur républicain J.D. Vance.
  • Les faux récits du réseau suivent une technique bien rodée : un “journaliste” ou “lanceur d’alerte” autoproclamé prétend détenir la preuve d’un acte de corruption scandaleux et cite des documents trafiqués. Le compte à l’origine de la fausse allégation a peu d’abonnés, mais la vidéo est rapidement reprise par des dizaines de sites obscurs pro-Kremlin, avant d’atteindre les organes de propagande officiels russes et, dans de nombreux cas, des médias grand public.
  • Malgré ses dénégations, NewsGuard a déterminé que John Dougan est profondément ancré dans l’appareil médiatique de l’État russe et qu’il a des liens avec des acteurs étatiques. Il apparaît régulièrement dans les médias d’État russes et a participé à un programme financé par le Kremlin pour promouvoir la Russie auprès de publics occidentaux.

Le rapport spécial de NewsGuard fait suite aux récentes mises en garde de législateurs et de responsables du renseignement américains selon lesquelles les adversaires étrangers des États-Unis, qui utilisent désormais les dernières innovations en matière d’intelligence artificielle, sont prêts à influencer les prochaines élections américaines via la désinformation. En mai, la directrice du renseignement national américain Avril Haines a déclaré que “la Russie reste la menace étrangère la plus active pour nos élections”, s’appuyant sur un “vaste appareil d’influence multimédia” composé de relais d’influence, de cyberacteurs, de trolls sur les réseaux sociaux et de médias d’État. Le représentant républicain Michael Turner, président de la commission du renseignement de la Chambre des représentants, a déclaré en avril qu’il était “absolument vrai” que certains membres du Congrès relaient la propagande russe au sujet de l’Ukraine.

“Notre rapport sur John Dougan explique pourquoi la Russie demeure le leader mondial de la désinformation. En tant que fugitif américain, Dougan est très doué pour créer les fausses affirmations qui manipulent le plus efficacement l’opinion publique américaine, allant même jusqu’à tromper les élus américains pour qu’ils colportent la propagande du Kremlin”, déclare Gordon Crovitz, co-PDG de NewsGuard. “Les Américains et nos alliés doivent être sur leurs gardes face à la désinformation russe, y compris celle générée par l’IA, en particulier en cette année électorale”.

 

À propos de NewsGuard

Fondé par le journaliste primé et entrepreneur des médias Steven Brill, et par Gordon Crovitz, ancien directeur de la publication du Wall Street Journal, NewsGuard fournit des outils transparents pour lutter contre la mésinformation à destination des lecteurs, des marques et des démocraties. Depuis son lancement en 2018, son équipe de journalistes internationaux et de spécialistes de l’information a recueilli, mis à jour et déployé plus de 6,9 millions de données sur plus de 35.000 sources d’information et d’actualité, et catalogué et suivi tous les principaux récits faux circulant en ligne.

Les analystes de NewsGuard, aidés de multiples outils d’intelligence artificielle, gèrent la base de données la plus vaste et la plus fiable sur l’actualité du secteur de la confiance. Ces données sont déployées pour peaufiner les modèles d’IA générative et leur fournir des garde-fous, pour permettre aux marques de diffuser leurs publicités sur des sites d’actualité de qualité et d’éviter les sites de propagande ou d’infox, pour fournir des outils d’éducation aux médias aux internautes, et pour soutenir les gouvernements démocratiques dans leur lutte contre les opérations de désinformation hostiles ciblant leurs citoyens. 

Parmi les autres indicateurs de l’étendue des opérations de NewsGuard, on peut citer le fait que les critères apolitiques et transparents de NewsGuard ont été appliqués par ses analystes pour évaluer la fiabilité des sites représentant 95% de l’engagement avec l’actualité dans neuf pays.